Toutes les entreprises françaises devront être désormais en mesure de recevoir des factures dématérialisées. Pour l’émission, les PME et les microentreprises bénéficieront d’un délai supplémentaire d’un an. Dans ce contexte, La Réunion s'active aussi pour s'arrimer aux nouvelles donnes et les responsables sont appelés à rassurer les opérateurs économiques.
Dès l’an prochain, de grands groupes comme EDF n’enverront plus de factures papier à leurs clients professionnels. « Si les entreprises ne sont pas prêtes, elles ne recevront rien », rappelle la Direction régionale des finances publiques (DRFIP). Derrière cet enjeu technique se cache une véritable transformation des pratiques comptables et fiscales. « La facturation électronique doit permettre de gagner en productivité et en efficacité, mais aussi de raccourcir les délais de paiement », souligne Ludovic Robert, directeur régional des finances publiques. Le dispositif signera également la fin des déclarations de TVA : l’administration pourra suivre en temps réel l’activité économique et identifier plus rapidement les secteurs en difficulté.
Pour Jérome Canabady Moutien, président de l’Ordre des experts-comptables de La Réunion, il s’agit d’« une révolution numérique et fiscale » qui concerne bien au-delà du simple envoi de factures. « Ce n’est pas juste transmettre un PDF par mail », insiste-t-il. Gestion, process internes, obligations déclaratives et relations avec l’administration fiscale seront bouleversés. Si les pouvoirs publics mettent en avant les gains de productivité et la simplification administrative, la réforme suscite des inquiétudes parmi les chefs d’entreprise. Beaucoup se disent déjà éprouvés par Chorus, la plateforme de l’administration publique utilisée pour transmettre les factures de la commande publique.
Cette fois, il n’y aura pas de guichet unique mais des opérateurs privés, labellisés par l’État, qui assureront le traitement des factures. Leur rémunération reste un point sensible. « On a encore des inquiétudes. Ça ne sera pas gratuit, malheureusement », regrette Jean-Philippe Payet, délégué général de la CGPME. Le coût et la complexité de la mise en place inquiètent surtout les petites structures. « Certaines entreprises ne sont pas sûres de passer l’année, alors difficile pour elles de se projeter sur une telle réforme », souligne Bernard Picardo, président de la Chambre des métiers et de l’artisanat. Du côté de la CCIR, Frédéric Dijoux appelle à une communication renforcée et à la mise en place de formations dans toutes les chambres consulaires.
Si les inquiétudes sont perceptibles, certains responsables y voient aussi une opportunité. « Moins de paperasse et moins d’erreurs », estime Olivier Fontaine, président de la Chambre d’agriculture, tout en reconnaissant que la transition représentera « une grande difficulté » pour nombre de professionnels. Du côté du Medef, Virginie Goraud admet les craintes des adhérents, notamment sur le coût et le contrôle accru de l’État, mais appelle à l’anticipation : « Si on réalise des points d’étape réguliers, ça peut être une belle réussite ». En attendant, les organisations professionnelles et consulaires se mobilisent pour accompagner les entreprises. La réforme de la facturation électronique s’annonce comme un tournant incontournable de la digitalisation des échanges économiques, mais son succès dépendra largement de la capacité des acteurs à se préparer dès aujourd’hui.