Au 30 septembre 2025, l’African Growth and Opportunity Act (AGOA), dispositif phare qui permettait à plusieurs pays de la région d’exporter vers les États-Unis sans droits de douane, a officiellement expiré. Cette fin, bien que redoutée depuis plusieurs mois, ne signifie pas pour autant que la porte américaine se ferme définitivement aux exportateurs, notamment de Madagascar et de Maurice.
La Maison-Blanche a en effet indiqué soutenir une extension technique d’un an, une position qui rejoint des signaux déjà donnés par certains responsables africains au cours des dernières semaines. Selon l’agence Reuters, citant un responsable américain, l’administration Trump appuierait une prolongation de 12 mois, le temps de permettre une révision plus globale du dispositif. Cette extension pourrait être intégrée dans une Loi de finances temporaire ou votée ultérieurement avec effet rétroactif, si un accord politique se matérialise au Congrès. En d’autres termes, l’exécutif américain s’affiche favorable à un compromis, mais la décision finale repose sur les parlementaires.
Quelques jours plus tôt, l’Agence Ecofin rapportait déjà les propos de Mokhethi Shelile, ministre des Entreprises, de l’Industrie et du Commerce du Lesotho. De retour d’une mission diplomatique à Washington, celui-ci avait affirmé avoir obtenu des assurances informelles de la part de membres clés du Congrès, en particulier de la House Ways and Means Committee et de la Senate Finance Committee. Selon ces échanges, une prorogation pourrait intervenir d’ici novembre ou décembre, une fois les débats budgétaires apaisés.
L’absence actuelle de régime préférentiel n’est pas sans conséquence. Sur le plan commercial, elle renchérit mécaniquement les coûts d’accès au marché américain pour les producteurs africains. Or, les nouveaux tarifs décidés par Washington cette année inquiètent déjà de nombreux acteurs économiques sur le continent. Plusieurs organisations professionnelles et gouvernements africains multiplient depuis des mois les plaidoyers pour la prorogation de l’AGOA, afin de préserver les emplois et la compétitivité des entreprises locales.
Sur le plan politique, l’annonce de la Maison-Blanche constitue un signal encourageant, mais insuffisant. La sécurité juridique, indispensable aux investisseurs comme aux exportateurs, dépend d’une décision législative claire. « Le renouvellement de l’AGOA reste un levier essentiel pour préserver et créer des emplois, tout en facilitant l’accès de nos entreprises aux marchés internationaux », a rappelé le président sud-africain Cyril Ramaphosa, le 24 septembre à New York, en marge de la 80ᵉ Assemblée générale des Nations unies. Toutefois, les interrogations demeurent. Une rallonge technique d’un an ne ferait que repousser l’échéance et entretiendrait l’incertitude. Les entreprises africaines devront-elles revivre le même scénario à l’automne 2026 ? Cette extension traduit-elle une véritable volonté de réforme de l’AGOA ou s’agit-il d’un simple sursis face aux blocages du Congrès ?
À ce stade, les observateurs rappellent qu’une proposition plus ambitieuse a déjà été déposée en 2024. Elle visait à prolonger l’AGOA jusqu’en 2041 et à l’arrimer à la Zone de libre-échange continentale africaine (Zlecaf). Ce texte prévoyait une extension de 16 ans afin d’offrir de la visibilité aux investisseurs, l’introduction d’une évaluation biennale des pays éligibles, ainsi qu’une plus grande flexibilité dans l’application des sanctions. Entre la promesse d’une réforme en profondeur et le risque d’une simple solution transitoire, l’avenir de l’AGOA se jouera dans les prochains mois au Congrès. D’ici là, les exportateurs devront naviguer dans une zone d’incertitude, cruciale pour leurs perspectives commerciales.